[Cour d’honneur du Château d’Orléans]
Le Perplexe attendait en Orléans, impatient qu’arrive enfin le convoi qu’il avait fait mander. Cela faisait pratiquement une heure qu’il poireauter, et même s’il était plutôt du genre patient, il n’aimait guère rester planter à ne rien faire de se dix doigts, alors que son temps aurait certainement été mieux investi dans une toute autre tâche. Patience, c'est ce qu'il se disait, alors que cela faisait déjà quelques temps que le coursier l'avait averti de l'arrivée imminente d'un convoi portant les armes de Carentan.
Finalement, le Perplexe se trouvait au bon endroit au bon moment. Au départ, il n'était absolument pas venu en Orléans pour participer à des joutes, du moins pas à celle qui se déroulaient sur la lice, mais pour les négociations mandées par le Chambellan et tout le corps diplomate de l'Orléans. Il s'était donc dit "pourquoi pas". Après tout, autant profiter de sa présence et de la mise en place de ces festivités pour se remettre dans le bain, comme dirait l'autre. Cela faisait très longtemps qu'il n'avait point jouter, depuis son propre règne en tant que Duc de Normandie. Mais cela était une bonne occasion de voir s'il n'avait pas trop perdu de ses capacités, si ses réflexes ne s'étaient pas très émoussés, et s'il pouvait toujours tenir le rythme et la cadence de pareille compétition, avec la résistance adéquate pour supporter les chocs qui se produisaient inexorablement dans ce genre de compétition.
Mais il restait pourtant un soucis majeur: il n'avait point tout son attirail sur lui, n'était point venu dans cette optique là. Il doutait que cela soit prudent de jouter juste vêtu d'un tunique, et puis il risquait soit de la tâcher, soit de la déchirer... Il pouvait bien sûr demander à ce qu'on lui prête le matériel nécessaire, mais les lourdes armures d'apparat se devait d'être au mieux ajustée au corps du jouteur. Qui plus est, qui se sentirait confortablement installé dans les chausses d'un autre? aussi avait-il fait mander un rapide coursier en partance pour la Normandie afin de porter un message à l'attention de l'intendant de Carentan, le fidèle et toujours aussi lubrique Riton. Et c'est donc ce joyeux compagnon que le Chevalier attend au château d'Orléans... Puis une silhouette connue se dessina enfin, à peine sortie du poste de garde.
-Et bien, Riton, tu en as mis un de ces temps pour arriver jusqu'ici. Pourtant, la Normandie n'est pas si loin que ça!
- Messire, le bonjour. Je vous prie d'excuser mon retard, mais le temps de rassembler tout ce dont vous aviez besoin pour jouter, les pluies se sont mises à tomber, rendant le trajet quelque peut laborieux sur des routes boueuses... Et puis il est plus difficile pour nous de passer les différents postes de garde...
- Bah, ce n'est pas grave, le tout est que tu es arrivé avant le début de la compétition. Allez viens, nous allons monter le campement, il faudra ensuite que je me prépare. J'espère que tu n'as rien oublier...
Et voici donc un convoi normand parti en direction de l'emplacement pour les jouteurs... Le Perplexe regarda ses hommes monter le camp, les tentes se dressèrent, les draperies ornaient les tentures, les pièces d'armure étaient délicatement sorties de leur coffre de bois protecteur. L'étendard aux armes du Duc flottèrent bientôt sur sa tente, Cany, Bolbec, Vernon, Carentan, Massy... Ah tous ces fiefs qui lui rappelaient sa Normandie natale, qu'il n'avait point revu depuis de longs mois déjà...
- Riton, prépare les pièces d'armure et fait seller ma monture, je vais tout d'abord assister à la présentation des armes avant de devoir m'encombrer de tout cet attirail...
- Bien messire, tout sera prêt à votre retour.
Le Perplexe prit donc la direction de la lice, espérant apercevoir un héraut, l'arbitre ou alors le tableau d'affichage...